Agrivoltaïsme et centrales solaires sur friches : tout comprendre sur leurs points communs et leurs différences

L’agrivoltaïsme combine production agricole et énergie photovoltaïque tandis que les centrales solaires implantées dans des friches permettent de réhabiliter des terrains délaissés. Dans les deux cas, l’objectif est de produire de l’électricité avec une double valorisation du terrain. Éclairage sur ce qui nous permet de rapprocher et distinguer ces deux solutions en faveur de la transition énergétique.

Le contexte du solaire photovoltaïque au sol

Depuis 15 ans, le parc solaire a fortement progressé en France pour atteindre une production d’environ 25 GW fin 2024. Dans le cadre de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), l’objectif est d’atteindre 35 à 44 GW d’ici 2028. Cela a été institué par la loi de transition énergétique. En effet, la production d’électricité d’origine photovoltaïque répond à de multiples enjeux : souveraineté énergétique, développement des énergies renouvelables, défis climatiques…

Si la priorité avait été donnée tout d’abord à l’intégration des équipements photovoltaïques aux bâtiments (en toiture), la réalisation d’installations solaires au sol apparaît comme indispensable pour correspondre aux objectifs énergétiques de la France. Et nombreux sont ses atouts ! Orientation optimale, maintenance facilitée, moins de contraintes techniques et structurelles, une couverture de plus grandes surfaces maximisant la production sur un seul site… Par ailleurs, ces installations sont construites de façon organisée et réglementée afin d’éviter tout risque d’artificialisation des sols.

Agrivoltaïsme et centrales solaires sur friches : quelles définitions ?

L’agrivoltaïsme désigne l’installation de panneaux photovoltaïques sur des terres agricoles avec pour impératif d’apporter un service direct à l’activité agricole. La production agricole doit rester principale et significative, garantissant un revenu durable à l’agriculteur. Les services offerts par les installations agrivoltaïques incluent obligatoirement un des services suivants :

  • L’amélioration du potentiel agronomique des sols,
  • L’adaptation au changement climatique (réduction de l’évapotranspiration, protection contre le gel),
  • La protection contre les aléas climatiques (grêle, sécheresse),
  • L’amélioration du bien-être animal (ombrage pour les animaux).

L’agrivoltaïsme est donc compatible avec différents types de cultures ou d’élevage. Dans ce type de projet, il peut y avoir un ou plusieurs agriculteurs ou éleveurs qui « exploitent » les terres où sont implantés les panneaux (ils peuvent être propriétaires ou locataires).

Les centrales solaires implantées en zone de friches sont des installations photovoltaïques au sol déployées sur des terrains non exploités ou dégradés, comme d’anciennes carrières, des sites industriels pollués ou des terrains non cultivés depuis au moins 2013. Ce type de terrains appartient souvent à l’État, aux collectivités ou bien encore à des entreprises…

Attention, le terme de « friches » est précisément défini en France dans l’article L.111-26 du Code de l’urbanisme depuis décembre 2023. Ainsi, une « friche » s’entend de tout bien ou droit immobilier, bâti ou non bâti, inutilisé et dont l’état, la configuration ou l’occupation totale ou partielle ne permet pas un réemploi sans un aménagement ou des travaux préalables.

L’objectif principal d’un projet photovoltaïque développé sur une friche diffère donc de l’agrivoltaïsme. Ces centrales permettent de valoriser des terres incultes ou dégradées. Le but est ici l’optimisation foncière et la production d’énergie renouvelable sans conflit d’usage avec l’agriculture.

Agriculture ou friches : quelles conditions et obligations ?

Agrivoltaïsme : des garde-fous réglementaires pour maintenir l’agriculture

Le caractère double de l’agrivoltaïsme (agriculture et énergie) implique de facto une implantation dans une parcelle et le maintien de l’activité agricole dans la durée. Cette préservation de la finalité agricole est contrôlée par des critères stricts définis dans la loi APER (mars 2023) et ses décrets d’application. La production doit se maintenir au minima à 90 % du rendement habituel. La loi prévoit aussi un suivi de la moyenne des revenus agricoles après implantation de l’installation photovoltaïque.

L’installation agrivoltaïque doit par ailleurs respecter des normes d’implantation et de conception. Le taux de couverture des panneaux par rapport à la parcelle est plus faible que pour les friches. Il ne faut pas que l’ombrage soit trop fort sous peine de gêner la photosynthèse et le passage des bêtes. Les panneaux sont surélevés ou ajustables, permettant de moduler l’exposition lumineuse des cultures ou de laisser passer les animaux en dessous.

En cas de projet, on distingue des technologies dites « éprouvées » listées par arrêté ministériel de celles dites « non éprouvées » soumises à des contraintes additionnelles. Pour ces dernières, la surface couverte par les panneaux photovoltaïques ne doit pas excéder 40 % de la parcelle agricole si l’installation est supérieure à 10 MWc. Dans certains cas, une zone témoin sans panneaux doit être implantée pour comparer l’impact sur la production.

 

Centrales sur une friche : un document-cadre départemental

Les centrales solaires installées dans des friches utilisent généralement des panneaux fixes ou des trackers installés en rangées sur des structures métalliques. Le taux de couverture est plus important qu’en agrivoltaïsme, ces installations maximisent le rendement énergétique sans contrainte agricole. 

Attention, leur implantation est limitée aux terrains identifiés dans un document-cadre départemental, élaboré par la chambre d’agriculture et validé par le préfet. Ce type d’installation est soumis au respect d’enjeux écologiques et au fait de ne pas accueillir d’activité agricole, même non déclarée, avant 2013. (ex : maintien des sols perméables).

Dans les deux cas, les panneaux doivent être démontables en fin de vie, avec des garanties financières pour assurer le retour du terrain à son état initial.

La rentabilité et le modèle économique de chaque solution

Les installations photovoltaïques sur des friches ou en parcelles agricoles nécessitent des investissements significatifs, et plusieurs modèles économiques existent pour financer ces projets.

L’agrivoltaïsme concilie la production agricole et d’énergie, il y a donc un double revenu sur la parcelle. L’intégralité des  investissements est supportée par les porteurs de projet en énergies renouvelables. La proposition de loyer est étudiée avec le propriétaire et l’exploitant afin de garantir un partage de la valeur équitable. Si l’agriculteur est propriétaire des terres, il percevra un loyer annuel dans le cadre d’un bail emphytéotique avec le développeur. Si l’agriculteur est locataire, il partagera alors le loyer avec le propriétaire. Dans ce cas-là, en addition l’exploitant reçoit une aide pour son installation, sa transformation ou sa pérennisation (financement d’un hangar, séchoir en partie, accès à l’eau pour un troupeau, sécurisation d’une zone de pâturage avec clôture et caméra de surveillance).

Quant aux centrales solaires sur friches, leur modèle économique est basé sur les loyers perçus par le propriétaire. Contrairement à l’agrivoltaïsme, il n’y a pas d’activité agricole et d’aide à l’installation.

Critères Agrivoltaïsme Centrales solaires sur friches
Usage du foncier Symbiose entre production agricole et production énergétique Revalorisation des zones délaissées
Rentabilité économique Perception de loyer + Revenus agricoles

Taxes locales pour les communautés des communes et le département

Loyers
Contraintes réglementaires Encadrement strict.

Critères variables selon la capacité et les technologies (éprouvées ou non éprouvées)

Dépend du type de friches

Listes des friches dans le document-cadre départemental

Conception Panneaux surélevés ou mobiles pour s’adapter aux besoins des cultures ou de l’élevage. Panneaux souvent posés sur structures fixes ou au sol.

Friches ou agriculture : quelle approche solaire privilégier ?

Le choix entre agrivoltaïsme et l’installation de centrales sur des friches dépend des enjeux locaux et du type de terrains disponibles. Les deux approches, à la fois différentes et complémentaires, contribuent à notre indépendance énergétique ainsi qu’à l’essor des énergies renouvelables.

L’agrivoltaïsme permet de maintenir une agriculture active tout en développant des énergies renouvelables, tandis que les centrales sur friches sont une option intéressante pour optimiser des terrains non valorisés, avec un meilleur rendement énergétique.

Les évolutions réglementaires actuelles encadrent ces pratiques pour éviter le détournement des terres agricoles vers des projets purement énergétiques. Il reste essentiel d’adopter une approche territoriale équilibrée qui associe l’ensemble des parties prenantes.

 

Sources :